Chaka, une épopée bantoue est l’histoire du roi fondateur du Royaume Zoulou. Ce roman a vite dépassé les frontières du pays de son écrivain Thomas Mofolo qui est originaire du Lesotho. Publié en langue sotho en 1925 pour la première fois sur les presses de la Société des missions évangéliques de Paris, il est rapidement traduit en plusieurs langues, dont le français, l’anglais, l’afrikaans ou encore l’italien.
Bouillonnantes aujourd’hui, demain de la boue !
Elles finissent par se dessécher un jour,
Les eaux, si profondes soient-elles.
Une épopée africaine
C’est sous forme d’épopée qu’est conté le destin hors du commun de ce roi du XIXe siècle. Chef charismatique et fin stratège, il mène de larges conquêtes avec son armée de plus de 600 000 hommes.
Et pourtant, rien ne le destinait à cette vie bien singulière; lui, fruit de l’union illégitime entre Nandi, princesse Lanegni, et Senza Ngakona, chef de Nguni. Durant toute son enfance, il connaît humiliation et exil. Lui et sa mère finissent par se réfugier chez Dingiswayo, souverain des Bathwetwa. Là-bas, il devient un guerrier exceptionnel et commence son initiation sous l’aile du médecin-féticheur Issanoussi qui lui prédit un avenir glorieux, à condition qu’il ne verse aucune goutte de sang…
« La célébrité c’est quelque chose de doux à posséder ; je n’éprouverais aucun plaisir, en effet, à gagner le pouvoir même un pouvoir démesuré, si je n’obtenais pas la célébrité en même temps ; cette célébrité, c’est dans le cliquetis des armes que je la veux, lorsque s’écroulent les vaillants hommes au cou robuste et que s’effondrent les hommes ardents au combat. Je veux que mon pouvoir souverain, ce soit moi-même qui me le sois acquis, et cela afin d’accroître encore ma réputation.»
Stratégie militaire et conquêtes
Lorsque son père, Senza Ngakona, meurt, il lui succède. Dingiswayo est aussi assassiné par son ennemi Zwide. Chaka se venge et se proclame roi des Zoulous. Dès lors, il se lance dans à la des territoires voisins grâce à son armée grandissante et sa stratégie militaire. Il s’étend vers l’Est et le Sud pour combattre les Tembou, Pondo et Xhosa mais aussi les Nguni, les Swazi et les Sotho.
Chaka devient au fur et à mesure un assoiffé de pouvoir, quitte à faire régner la terreur et à multiplier les massacres. Cependant, le pacte passé avec Issanoussi ne tient plus, car trop de sang a été versé. Il finit par être abandonné de tous et tue la majorité de ses proches, la folie s’étant emparée de lui.
Lorsque sa mère Nandi meurt, il fait exécuter plus de 7000 femmes et hommes, empêche les gens mariés de se fréquenter pendant un an et interdit la consommation de lait. Sa dépression s’ajoute à sa cruauté teintée de démence meurtrière. Il finit par être poignardé par ses frères cadets.
Chaka Zoulou est considéré comme un personnage complexe. D’une part, il est vu comme un incroyable guerrier unificateur qui a su créer une grande nation s’étalant jusque l’océan indien, et d’autre part comme un chef tyrannique assoiffé de pouvoir.
Un livre d'action
Cette épopée est passionnante, mystique et poétique. C’est un livre qui vous transporte par son récit et sa richesse d’écriture. En effet, l’auteur utilise une prose bien maîtrisée, où les images se succèdent s’alternant entre beauté et horreur, réalité et légende. C’est aussi un saut dans une Afrique australe du XIXe siècle, où l’on redécouvre les traditions, les sociétés et les religions de l’époque. L’écriture est dynamique, avec peu de temps creux avec des actions qui s’enchaînent pour le plus grand bonheur de notre attention. Si vous êtes un fan d’action, ce livre est fait pour vous.
Une image négative de Chaka Zoulou
J’aimerais tout de même ajouter quelques éléments de contexte à la rédaction de cette épopée. Thomas Mofolo écrit ce livre en Sotho et ce n’est pas anodin, en effet, c’est une langue parlée par les Basothos, dont il fait partie et qui s’opposaient farouchement à l’empire zoulou, contre qui ils combattaient pour garder leur indépendance. Ceci expliquerait donc l’image plutôt négative donnée à Chaka dans cet ouvrage.