La guerre en RDC fait encore rage. Les affrontements entre les FARDC et le M23 continuent de ravager l’est du pays. On parle de conflits ethniques, de tensions politiques, de querelles régionales… mais rarement des véritables causes. Ce qui se joue ici dépasse de loin un simple affrontement entre voisins.
Ce n’est pas seulement une guerre entre le Rwanda et la RDC, ni un simple conflit entre rebelles et gouvernement. Ce n’est pas qu’une affaire africaine. C’est une guerre aux ramifications mondiales, un affrontement autour des ressources, un puzzle géopolitique où chaque pièce est déplacée avec soin pour servir des intérêts bien précis.
Toutes ces sécessions, qu’elles aient eu lieu en RDC avec le Katanga, au Nigeria avec le Biafra, au Soudan ou au Mali avec l’Azawad, se sont toujours déroulées sur fond de guerres fratricides. Des millions de morts, des scènes d’horreur innommables, des massacres où les mots deviennent insuffisants pour décrire l’indescriptible.
C’est ce qui se passe encore aujourd’hui en RDC, avec un Rwanda soutenu par l’Occident, alors que son rôle derrière le M23 n’est plus à prouver. Ce soutien international peà Kigali d’avancer sans réelle opposition, sous prétexte de stabilité régionale ou d’une prétendue légitimité stratégique. Mais derrière ces justifications, il s’agit bien d’un pillage organisé, maquillé sous les atours de la diplomatie et de la sécurité régionale.
Ce qui se joue en RDC n’est pas un cas isolé. L’histoire africaine est jalonnée de ces guerres où les frontières, les rivalités et les crises ont été non seulement entretenues, mais parfois même créées par des puissances étrangères. Le découpage des nations africaines suit un schéma bien rodé : affaiblir les États pour mieux les contrôler.
Images de la guerre au Biafra
À chaque fois, les régions qui cherchent à se séparer regorgent de richesses géologiques. Une simple coïncidence ? Bien sûr que non. Le contrôle des ressources est, et demeure, la raison principale des guerres africaines.
Le Global Gateway et autres illusions diplomatiques
En juin dernier, j’ai été invitée en tant que journaliste africaine à observer les élections européennes à la Commission européenne à Bruxelles. Parmi les présentations, celle du programme Global Gateway : une enveloppe d’investissement de 150 milliards d’euros pour développer les infrastructures énergétiques et industrielles en Afrique. Un projet européen censé "renforcer les relations entre l’Europe et l’Afrique" sous le prisme de leur "histoire commune". You know, Africa, the sister continent. Mdr. Une histoire que nous connaissons tous… et qui n’a rien d’un conte de fées.
Alors qu’une diplomate européenne débitait un discours bien rodé pour nous convaincre de l’importance des liens Europe-Afrique, une slide a attiré mon attention : "Europe needs Africa, Africa needs Europe."
J’ai vite compris ce que cela signifiait : l’Afrique avait "besoin" de l’Europe pour construire de nombreux puits, censés étancher la soif des "pauvres Africains". Mais l’Europe, elle, de quoi avait-elle besoin ?
Ma main levée, j’ai posé la question : "Pourquoi l’Europe a-t-elle besoin de l’Afrique ?"
La diplomate, prise au dépourvu, a fini par lâcher la vérité : "Sécuriser l'accès aux ressources africaines en intégrant plus d’entreprises européennes du secteur privé, notamment en RDC."
Voilà donc l’essentiel : assurer la transition énergétique et numérique de l’Europe en exploitant les ressources africaines, quitte à perpétuer les guerres qui les entourent.
Passons à l’électrique en Europe… et continuons de massacrer l’Afrique.
L’Europe veut son indépendance énergétique et digitale, mais à quel prix ? La transition écologique est en marche : les voitures électriques remplacent les moteurs thermiques, les batteries au lithium et au cobalt deviennent l’or noir du XXIe siècle.
Tout est technologie. Tout est intelligence artificielle.
Mais pendant que l’Europe et l’Occident célèbrent leurs avancées, ils continuent d’exploiter les mines africaines, ignorant délibérément le coût humain de cette industrie.
Le panafricanisme, une nécessité entravée !
Le panafricanisme est une belle idée, souvent difficile à concrétiser, car l’histoire nous a appris à voir nos différences avant ce qui nous unit. Le vrai changement viendra en déconstruisant ces barrières mentales. Les armes tomberont lorsque nous désignerons l’ennemi commun, celui qui nous menace et entrave le rêve africain.
La RDC n’est pas un simple conflit africain. C’est un enjeu mondial. Le monde l’a compris. Il est temps que nous le comprenions aussi.
Ne cédons pas aux narratifs qui nous divisent. Derrière ces guerres, il n’y a qu’un maître : l’argent. Et tant que nous ne dénoncerons pas ce cycle infernal, il continuera d’engloutir des vies, des nations… et l’avenir de tout un continent.
Recommandations de lectures:
- Adichie, Chimamanda Ngozi. (2006). L’autre moitié du soleil. Gallimard.
- Beti, Alexandre Mongo. (1972). Main basse sur le Cameroun. Maspero.
- Bofane, In Koli Jean. (2008). Mathématiques congolaises. Actes Sud.
- Onana, Charles. (2009). Holocauste au Congo. Duboiris.
- Lebrun, Fabien. (2022). Barnarie numérique : Le Congo sacrifié pour un monde connecté. Le Passager Clandestin.
- Collectif. (2021). L’empire qui ne voulait pas mourir. Seuil.