Boidié - Décembre 2015
A la lueur de l’ombre du baobab, je me sentis toute petite et légère sur cette terre ocre qui était mienne, j’étais sienne aussi. C’était ma terre.
Je regardais mes pieds dans mes sandalettes en cuir fraîchement achetées de l’artisanat de Bamako : à côté, quelques cailloux. Je les ramassai et les mis dans les poches de mon saroual qui me gardait fraîche malgré cette forte chaleur.
A défaut de te connaître, ma terre, j'emporte avec moi en souvenir, la pierre immuable et intemporelle qui me rappelle de ne jamais t’oublier.
Pleine d’émotion, je rebrousse chemin pour dire au revoir au village. Il était temps de partir. Les yeux sur les mains ouvertes vers le ciel, mon grand-père, paix à son âme, nous fait des bénédictions. En coeur, nous répétons,”Amine, Amine” (Amen, Amen). Ma grand-mère, que le ciel a emporté aussi s’affaire et bouge encore partout : l'énergie, elle, était son allégorie. Je l’admire. Elle dégageait de la force, de la puissance, de l'intelligence.
Nous retournons vers le 4x4 en direction de Bamako, puis de l’aéroport. Des peu de mots que je connais en Bambara, je la regarde et lui dis “ Initché “ (merci) , perturbée et émue, ses yeux se mouillent, elle me bénit.
Ce sont les derniers mots que je lui ai dit et j’aurais aimé lui en dire plus.
J’aurais voulu lui dire, leur dire, merci de m’avoir fait connaître l’amour, le vrai, l’amour pudique, qui même sans un mot se communique au travers des yeux, des gestes et des attentions. Cet amour dont l’intensité est sans limite. Cet amour qui se traduisait par une bouillie de mil que ma grand-mère n’oubliait pas de charger en sucre pour me faire plaisir, où ces discussions remplies de fous rires où mon grand-père sortait de son coffre les vielles archives éditées du temps du Soudan Français qu’il avait minutieusement gardées. Il partageait ses souvenirs qu’il nous racontait dans un français que je trouvais bien maîtrisé pour un homme né vers la fin des années 20.
L’amour que je porte pour mes racines est pur et simple dans ce vaste désert de l'inconnu.
Aujourd’hui, essayer de s’y reconnecter, de les comprendre, c’est retrouver la paix intérieure, le bonheur.
A mes grands parents, à ceux que j’ai connu, à ceux que j’ai uniquement aperçu sur une photo en noir en blanc, à ceux dont on m'a conté quelques anecdotes, pour vous, je me lance dans cette aventure pour que ceux qui le souhaitent puissent retrouver et redécouvrir le jardin de leur identité.
Paix à votre âme, vous êtes à jamais dans mon coeur et près de moi.
Credits photo : au pays du baobab