Apprendre l'histoire de l’Afrique à travers le regard de ses auteurs, tel est le fil rouge que j’ai choisi de suivre pour Au pays du Baobab. Vous l’aurez sûrement remarqué, les auteurs que je présente sont principalement des auteurs africains qui partagent leur expérience, car je souhaite que ce soient, eux, les enfants du continent, qui soient visibles pour raconter la nouvelle histoire des Afriques, de l’Afrique.
Aujourd’hui, peut-être que cela vous surprendra, ou pas, mais le livre que j’ai choisi de vous présenter ne nous vient pas d’un auteur africain mais d’une autrice antillaise, Valérie Rodney, qui s’intitule Pawol pou makrel. En toute franchise, je n’ai aucune maîtrise ou pratique de la culture antillaise et mon manque de connaissances commence à la lecture du titre que … je n’ai pas compris à la première lecture 😅 , ne parlant malheureusement pas le créole.
J’essaie néanmoins, avec enthousiasme, et tente de trouver une traduction valable...“Pawol pou makrel” … j’essaie de lier ce titre avec le français métropolitain … “Parole pour maquerelle” … j’hésite 🤔 , je ne suis pas sûr de la traduction aléatoire dans laquelle je m’aventure. Pour ne pas dévier sur la mauvaise piste … eh oui, ma professeur d’espagnol au collège m’ayant assez traumatisé pour mes traductions hasardeuses en me rappelant que “non : l’espagnol, ce n’est pas “facilo rigolo”… on ne rajoute pas un “o” ou un “a” à la fin de chaque mot" ! Je reviens de ce souvenir traumatisant et me dis que le créole, non plus, ne doit pas être aussi simple qu’il n'y parait … Je décide de trouver d’autres pistes en m’aventurant en quatrième de couverture, qui finalement, m’oriente enfin vers le bon chemin, notamment grâce à ces quelques lignes:
À travers mes persiennes, je suis témoin de vos cancans et de vos magouilles. Et, en tant que commère, je me dois de le colporter avec ma petite sauce d’exagération antillaise. Néanmoins, soyez indulgent avec la commère, car elle ne fait que vous prévenir des dangers de la vie.
Pawol pour makrel … signifierait plus ou moins “paroles pour commères”...qu’en pensez-vous amis antillais😜 ?
Je continue de lire et apprécie le ton, qui interpelle le lecteur et la langue française mélangée au créole qui m’indique que mon immersion sera authentique.
Enfin, la dernière phrase de la quatrième de couverture “pour que les petits gens comme nous accèdent et participent à l’Histoire qui façonne nos sociétés créoles” fait que je me retrouve dans ce projet de l’autrice, et dans cette volonté que nous participions tous à la construction et l’écriture de notre Histoire qu’importe d’où nous venons.
Je décide de commencer ce livre qui se compose de quinze petits contes indépendants annoncés dans le sommaire. Chaque conte porte un titre. Certains sont en français, d’autres en créole.
Mais n’ayez crainte, chaque mot en créole nous ait défini par le lexique, en fin d'ouvrage, qui nous permet de ne rien rater des enseignements et de la sagesse que nous révèlent ces contes.
Au fur et à mesure de la lecture, je réalise la place importante que les traditions, spiritualités et religions africaines ont dans la culture populaire antillaise. Il y a plus d’un demi-siècle, l’Afrique est arrivée aux Antilles et n’est plus jamais repartie. Arrivée tragique que Valérie Rodney nous sommes de ne jamais oublier, ainsi que tous les apports culturels des peuples qui se sont croisés sur ces terres antillaises par la force des choses.
Dans notre reconnaissance, malgré l’Histoire tragique (qu’il ne faut pas oublier) et la ségrégation raciale, il n’y a eu l’Amour entre nous (tamouls, nègres, chinois, etc) face à la misère des champs de canne.
La spiritualité est ainsi omniprésente dans ce livre et rappelle ce lien indéfectible entre les Antilles et l’Afrique qui se trouve dans cette culture commune où les mondes du visible et de l'invisible sont en continuelle interaction. De fait, on retrouve des références aux religions venues d’Afrique telle que le Vodou au fondement du Quimbois et dans les rites encore pratiqués qui montrent que les réponses aux maux ne se trouvent pas toujours dans la logique cartésienne occidentale.
Ce lien fort entre ces deux espaces se relève aussi dans une forme de volonté forte du retour en terre mère africaine qui est décrit dans plusieurs contes notamment Papiyon volé sé nèg-la ki ka volé ou encore La drive des esprits.
Au-delà de ces thèmes, l’écriture espiègle, pleine d’humour qui interpelle directement le lecteur donne beaucoup de dynamisme et de légèreté à la lecture. Un ton essentiel à l’écriture des contes qui au-delà de dessiner un sourire sur nos lèvres nous donne un enseignement plein de sagesse pour nous “prévenir des dangers de la vie”.
Je remercie beaucoup Valérie pour cette lecture très agréable et je la remercie surtout de rappeler l’histoire et la culture commune que les Antilles et l’Afrique partagent et surtout sa volonté, à elle, de participer à l’écriture de cette Histoire.
➡️ Pour acheter le livre :
- sur le site : cliquez sur le lien