Article rédigé par Meriyem KOKAINA
“Chaque homme a sa terre: s’il est dit que ton destin doit s’accomplir en tel pays, les hommes n’y peuvent rien”.
Qui de mieux qu’un griot pour vous chanter les exploits des ancêtres et des grands qui ont fondé le pays. N’est-ce pas mystique et magique que de savoir qu’une histoire millénaire est contée depuis des siècles et des siècles dans toute sa puissance par des artistes maîtrisant l'art de la parole et des louanges à merveille.
Notons que dans l’Afrique antique, comme l’indique D.T Niane dans sa préface, “le griot apparaît comme l’un des membres les plus importants de la société car c’est lui qui, à défaut d’archives, détenait les coutumes, les traditions et les principes de gouvernements des rois”
Dans une culture de tradition orale, la place des griots est centrale, en particulier, dans la société malienne car ils ont participé après la colonisation à la reconstruction de l’identité nationale. Ils accompagnent leur chants d'instruments traditionnels par des instruments dont le balafon, le luth, le jeli koni ou encore la kora.
L'art des griots reste intangible, mais certains, ont décidé de sortir des codes imposés aux griots pour devenir des artistes à part entière chantant des thèmes d'horizon plus large. Un des meilleurs exemples reste Salif Keita.
Un des chants de griots le plus historique que je souhaite partager avec vous est celui de Soundiata Keita, retranscrit par NT Diane dans Soundiata ou l’épopée mandingue.
Lalo Keba - joueur de Kora mandingue
Maghan Kon Fatta, le père de Soundjata, régnait sur le royaume du Mandingue. Il était connu pour sa grande beauté et sa sagesse. Un jour, un chasseur du Sangaran, prédit, à la demande du Roi, son avenir. Il y vit son union avec une femme laide, même affreuse, qui portera son héritier et qui “ rendra le nom du Manding immortel à jamais”. Un jour, deux chasseurs du pays de Do, de la tribu des Traoré, apportèrent cette fille au Roi. Elle se nommait Sogolon Kedjou car elle était bossue,” Elle sera une femme extraordinaire si tu arrives à la posséder” disait la femme buffle de Do. De cette union, naquit l’enfant Lion, “Maghan du nom de son père et Mari Djata, nom qu’aucun prince du Manding n’a porté” dit aussi Soundiata . L’enfant roi infirme à la naissance s’est fait refuser l’accès au trône à la mort de son père. C’est sa première épouse qui s’établit en tant que régente et fit régner son fils Dankaran Touman.
Un jour, Soundjata demanda aux forgerons de réaliser la lance la plus lourde du royaume . A sa réception, l’infirmité de Soundjata s’évapora comme par magie, L’enfant infirme laissa place à l'enfant Lion. Sogolo était désormais respecté de tous.
Place place, faites de la place
Le Lion a marché
Antilopes cachez vous
Ecartez vous de son chemin
La Reine mère, ayant eu écho de la nouvelle et craignant pour sa place et le trône de son fils, essaya de tuer Soundjata en l'empoisonnant avec la complicité de sorcières. Il échappa à cette tentative, mais Songolo, la mère de Soundiata, décida de quitter le village et de s’exiler par crainte de représailles. Ayant trouvé refuge chez le roi Soumbala Cissé, Soundjata fit ses armes et devint vice-roi.
Pendant ce temps, le Mandingue était dirigé par un nouveau roi Soumaoro Kanté, un grand sorcier qui “pouvait lancer la mort sur qui il voulait”.
A la mort de sa mère, Soundjata partit revendiquer le royaume du Mandingue où des rumeurs de la mort du roi Soumaoro circulaient.
“Chaque homme a sa terre : s’il est dit que ton destin doit s’accomplir en tel pays, les hommes n’y peuvent rien”.
Longues et éprouvantes les batailles furent jusqu’à la victoire totale de Soundiata sur Soumaoro. Désormais à la tête de l’empire, il remercia ses alliés en donnant à chacun un royaume. Soundjata prononça la charte du Manden et établit les droits de chaque peuple. [cette charte est aujourd'hui au patrimoine mondial de l'UNESCO et est considérée comme la première charte des droits de l'Homme].
Il établit sa capitale à Niani, devenue “le nombril du monde”, ville de prospérité.
La légende veut qu’aucun roi à ce jour n’ait pu égaler la grandeur de Soundjata.
Balla Fasseké, griot de Soundjata a créé un chant que les griots chantent encore, dit le grand hymne “ Niama”:
Niama, Niama, Niama,
Toi, tu sers d’abri à tout.
Tout, sous toi vient chercher refuge.
Et toi, Niama,
Rien ne te sert d’abri.
Dieu seul te protège
C'est ainsi que s'achève le conte de Soundiata, fondateur de l'empire du Mali que chaque malien connaît.
Vous voici après lecture, un peu malien de fait :)